Le pouvoir d’être servi·e

Dominer par l’argent
Quand les grandes fortunes ne peuvent pas se passer de domestiques
Par Alizée Delpierre
Français

« Chez nous le personnel de maison, ce n’est pas une option, c’est un art de vivre, un besoin, c’est notre culture », affirme un aristocrate français en référence aux trois domestiques qu’il emploie à temps plein pour faire le ménage, cuisiner et le conduire lors de ses déplacements. Quel(s) sens et quel(s) usage(s) les grandes fortunes font-elles de la domesticité ? Comment expliquer qu’elles l’élèvent au rang de nécessité alors même qu’il s’agit d’un privilège que ne peuvent s’offrir, tout au plus, que quelques milliers de personnes en France ? En s’appuyant sur une enquête conduite auprès d’anciennes et de nouvelles fortunes européennes et de domestiques, l’article explore les pratiques et les significations sociales du recours à la domesticité à temps plein. Il met en évidence quatre usages sociaux de la domesticité : marquer une appartenance à la bourgeoisie très fortunée ; réaffirmer les lignes de clivage qui se dessinent au sein même de cette bourgeoisie ; assurer la reproduction sociale ; légitimer l’utilité sociale de la bourgeoisie. En contribuant aux champs de recherche sur le travail domestique rémunéré dans la mondialisation et sur les styles de vie et de consommation des milieux fortunés, l’article défend l’argument qu’en permettant ainsi d’asseoir la position sociale des multimillionnaires, la domesticité constitue l’un des socles de leur pouvoir en tant que classe dominante.

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  • besoin
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