Coupures d’eau et crise politique

Varia
Éléments pour une sociologie des transformations de l’État en Bolivie
Par Claude Le Gouill, Joan Cortinas Muñoz, Franck Poupeau
Français

Si le secteur de l’eau est devenu, depuis les années 1990, l’un des principaux domaines de contestation des politiques néolibérales, avec une multiplicité de luttes pour la remunicipalisation du service, le devenir des entreprises publiques qui en sont issues est cependant mal connu. Cet article revient sur le cas du service d’eau de La Paz, en Bolivie, où l’accord avec un consortium français a pris fin en 2007, et où les coupures d’eau qui ont affecté la ville en 2016-2017, s’inscrivent dans un contexte particulier de refondation de l’État. C’est en effet en Bolivie que se sont déroulées les « guerres de l’eau » qui ont conduit le pays à de profonds changements politiques avec la victoire d’Evo Morales, en 2005, sur la base d’un programme de réappropriation des ressources naturelles et de refondation de l’État. La crise hydrique fait apparaître des tensions entre centralisme et autonomie des organisations sociales qui avaient porté le président actuel au pouvoir, mais aussi entre niveaux de gouvernement : autorités nationales et municipales, comités institués de résidents, ONG internationales. L’analyse de cette transformation d’une crise hydrique en crise politique a ainsi pour objectif de contribuer à une sociologie des politiques publiques par l’analyse de la « division du travail étatique » et des luttes pour le pouvoir d’État. L’enquête réalisée auprès des principaux protagonistes de cette crise permet de faire apparaître un repli sur des savoirs techniques de l’ingénierie d’État, susceptible de freiner la mise en œuvre d’alternatives écologiques.

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