Le travail policier face à la réforme
Cet article interroge le rapport entre réforme politique et travail policier à partir d’une enquête ethnographique portant sur la mise en œuvre de la réforme dite des « Zones de Sécurité Prioritaires » (ZSP), décidée par le gouvernement socialiste en 2012. Depuis une vingtaine d’années, c’est en particulier l’introduction d’indicateurs de performance qui a retenu l’attention des travaux questionnant les transformations de la police sous l’effet du new public management. Dans cette perspective, la plupart des recherches disponibles ont appréhendé la réforme des institutions policières occidentales « depuis les sommets de l’État ». Actant la nécessité d’inclure les configurations « micro » dans l’analyse des objectifs, des acteurs et des effets des réformes, ce texte s’appuie sur une enquête ethnographique au sein d’un commissariat d’une grande ville française pour interroger les réappropriations locales de la réforme des ZSP. Nous cherchons notamment à montrer comment les cadres policiers mobilisent un savoir-faire leur permettant de répondre à la « demande politique » dans une double logique d’économie de moyens en interne, et d’affichage de l’expertise et de l’activité policières à destination de la hiérarchie et des partenaires (Mairie, Préfecture, Parquet, Éducation nationale, associations, bailleurs, etc.). Sur le terrain, cette réappropriation par les cadres des objectifs de la réforme conduit à la pérennisation, dans les quartiers dits « sensibles », de répertoires d’action classiques du travail policier, invitant à envisager la réforme des ZSP comme une politique « processuelle » et les cadres policiers comme des policy makers.
Mots-clés
- police
- réforme
- travail
- action publique
- ethnographie
- France