L’exercice collectif du pouvoir discrétionnaire
Cet article analyse l’exercice collectif du pouvoir discrétionnaire, à travers le cas des commissions de médiation départementales Droit au logement opposable (DALO). Ces instances collégiales rassemblent différents acteurs des politiques locales de l’habitat pour sélectionner les situations « prioritaires et urgentes » parmi celles des individus qui engagent une procédure de recours à la justice administrative afin d’accéder à un logement adapté. L’interprétation collégiale de la Loi DALO, qui offre explicitement une marge de manœuvre, s’inscrit dans des rapports de force sectoriels et localisés qu’elle affecte en retour. Étudier l’ancrage social et les ressources inégales des membres des commissions DALO selon les organisations qu’ils représentent permet de mieux saisir leurs logiques de fonctionnement. La qualification de la situation des demandeurs de logement apparaît alors comme le résultat d’un processus sans cesse renouvelé d’ajustement d’intérêts opposés et inégalement représentés vers des critères en partie extra-juridiques. Orienté par des considérations morales ou économiques en contradiction avec l’« esprit de la Loi », le tri des ayants droit n’en revêt pas moins un caractère légal, qui légitime un ciblage croissant de l’attribution de logements sociaux.