La colombe et les mouches. Frédéric Joliot-Curie et le pacifisme des savants
Résumé
La colombe et les mouches. Joliot-Curie et le pacifisme des savants Frédérique Matonti La mobilisation politique des scientifiques offre un éclatant paradoxe : alors que leurs découvertes sont fréquemment utilisées à des fins militaires, on les retrouve très souvent au premier rang des organisations pacifistes. Pour le comprendre, il faut tout d'abord tenter de saisir les spécificités de la mobilisation des scientifiques au regard de celles des intellectuels en général : leur pacifisme apparaît alors comme le produit des rapports que leur profession entretient avec les pouvoirs temporels. Cette hypothèse générale peut être éprouvée par l'analyse de la trajectoire exemplaire par l'intensité de son engagement de Frédéric Joliot-Curie, atomiste consacré par ses pairs et président du Conseil mondial pour la Paix. Cependant, cette « solution professionnelle » qu'est le pacifisme n'est pas exempte de risques de dévaluation des ressources professionnelles comme le montre la controverse dans les années 1950 autour de la guerre bactériologique en Corée dans laquelle se sont engagés les savants et Joliot en particulier.